Articles Tagués ‘sciences’

ou la graine ne pousse pas sous la charrue

Lire, chercher, lire, se documenter, connaître, lire, apprendre, toutes choses bien sympathiques et nourrissantes mais qui je l’avoue pauvre de moi, souvent passent fondues dans la casserole de l’oubli. Et puis parfois, paragraphe suivant ligne en dessous, une vérité soudain déroule son fil et s’installe ad vitam æternam comme une évidence dans le champ privé de nos certitudes. Alors on jubile, c’est l’extase, je suis celui qui sais, il faut que ça sorte : vite une conversation.

Ça c’est passé au mois d’Août sous la tonnelle en pause méridienne, devant mes collègues incrédules et moqueurs qui, flanqués d’une bonhomie perfide m’incitèrent de la sorte : « Alors, qu’est ce que tu as lu ce week-end ? » . Ô perche cruelle mais perche quand même, tant attendue et si désirée, comment ne point  m’en saisir :

 » Notre mémoire n’est pas dans notre tête  « .

Face à l’inexpliqué les réactions du monde scientifique, en fait des hommes scientifiques sont diverses : certains admettent le mystère et s’en satisfont, esprit indolent, intelligence craintive, ou le contraire ; d’autres bricolent du savoir, s’ adonnent aux mythes, expliquent la tête gonfle que rien ne peut les surprendre ; beaucoup nient, au nom de l’orthodoxie, s’enflamment et vocifèrent contre l’ingratitude de l’importun. Et puis il y a Rupert Sheldrake (et quelques autres encore…) qui nous réenchante la science, traduction française du titre original de son livre  « Freeing the spirit of enquiry ». Comme quoi au pays de Descartes et de Pascal, la liberté d’esprit ressort de la métaphysique mais peu importe cette éventuelle différence puisque Rupert Sheldrake lui-même dans son introduction s’inflige l’énumération de sa longue carrière d’homme de science au plus haut niveau de recherche et de qualification, un exercice sans doute obligatoire pour ancrer l’esprit du lecteur dans la compréhension et non dans la croyance.

Et donc R.S. de nous relater une réalité mystérieuse bien connue des laboratoires pharmaceutiques ( qui n’aiment des réalités trébuchantes que sonnantes ) : chaque produit chimique cristallise sous une forme privilégiée que l’on peut qualifier de naturelle en ce sens où elle est réputée correspondre à la structure moléculaire du dit produit. Or il arrive, qu’après une ou deux années de production, dans un laboratoire quelque part dans le monde industriel, une nouvelle forme cristalline apparaît et supplante celle dite naturelle et puis mystérieusement et sans corrélation possible, que cette nouvelle forme devienne la forme naturelle de ce même produit chimique dans tous les laboratoires du monde. Un changement de nature contre-nature ou bien la réalité naturelle est-elle d’une autre nature que celle sanctuarisée ?

R.S. en déduit l’existence d’un champ morphique comme il peut exister un champ magnétique. Un champ à mémoire de formes qui résonne dans l’univers (je rajouterai « non-local »), un champ qui mémorise les potentialités réalisées et les rend « modélisantes » par résonance morphique. A l’intérieur du Tout-Univers entendu comme l’ensemble auto-inclu de tous les possibles, les processus spatio-temporels présents transforment une possibilité virtuelle en une potentialité future rétro-agissante dans le présent. L’instant interfère avec son futur pour se poursuivre.

R.S. développe ensuite ses investigations à propos de notre mémoire personnelle qu’aucune étude n’a réussi jusqu’ à présent à localiser dans notre cerveau : on a pu établir avec des technologies de pointe, une cartographie précise de zones liées à un type de souvenirs mais la zone n’est pas le souvenir par lui-même ! Et si notre mémoire était à l’extérieur de nous, dans un champ morphique qui nous serait intimement lié (mais pas forcément exclusivement !). Notre cerveau serait un émetteur/récepteur de formes, comme une télévision qui reçoit des programmes télévisuels, ici la trace spatio-temporelle de notre vécu. Le souvenir reste dans son présent, soit pour nous un passé auquel on se reconnecte. Bien qu’un lien privilégié, presque quantique, nous lie au champ de notre mémoire, on peut concevoir que notre cerveau puisse se connecter plus ou moins fortement au champ mémoriel d’une autre personne, vivante ou disparue…

On peut concevoir également que tous ces champs entrent en résonance collective pour former un patrimoine commun. Ainsi un hominidé qui expérimente il y a 500 000 ans, l’utilisation du feu pour cuire un rôti de cerf, met (involontairement certes) son expérience à disposition de tous les hominidés de la planète par l’entremise du champ.Toute invention se trouve donc avoir de multiples co-auteurs bien qu’un seul généralement en retire le chant d’honneur.

Le champ morphique est la liberté de l’homme : une idée germe, se développe, devient commune. Toute idée peut ainsi devenir notre définition. Il n’y a de nature humaine que celle que l’on se fabrique collectivement.